UNCP - HistoirePortraits de grands championsChampions de FranceDes vélos et des hommes
Jérémy Roy, chevalier des temps modernes
Il nous arrive souvent de penser que le cyclisme s’apparente à une chanson de geste ; les coureurs nous apparaissent comme les chevaliers du Moyen-âge, chevauchant leurs montures à travers plaines et montagnes.
Nous avons éprouvé une grande émotion, en visitant la Chapelle Notre-Dame des Cyclistes à Labastide d’Armagnac, tout près de là où vivait le fier hidalgo Luis Ocana. ; admirant les vitraux magistralement réalisés par Henry Anglade, nous avons compris que le cyclisme n’est pas seulement un sport, car il confine à l’Art.
S’inspirant des plus beaux faits de son sport, Henry a transcrit dans l’éternité des vitraux, l’envolée de Coppi tel un aigle dans la Casse Déserte de l’Izoard, Coppi encore et Bartali oubliant un instant leur rivalité, pour s’offrir leur bidon, et bien sûr le coude à coude du Puy de Dôme en juillet 1964 quand Anquetil et Poulidor réveillèrent le vieux volcan.
Et ce jour là nous avons vérifié que le cyclisme est œuvre d’art, dés lors que les batailles et joutes qu’il a suscitées, demeurent dans la mémoire collective.
Il n’est besoin d’être prophète pour affirmer que dans 20 ou 30 ans et bien plus tard encore, des images du Tour de France 2011 resteront dans la mémoire des hommes et seront transmises aux générations de demain ; nous pensons notamment à celles représentant Jérémy Roy, jeune homme fier de Touraine, partant à l’assaut du peloton, au sortir du passage du Gois dés le premier jour de la course.
Qui pourra oublier l’audace de ce coureur, passant le Tourmalet en tête avant d’être happé par les cadors sur les pentes de Luz-Ardiden ? Qui ne se souviendra de cette échappée solitaire hissant Jérémy seul en tête à l’Aubisque, avant que le Norvégien Hushovd fonde sur lui, tel un oiseau de proie, à 2 kilomètres de la ligne d’arrivée à Lourdes ?
D’aucuns diront que le miracle ne s’est pas produit ce jour-là et ils auront raison ; car il ne peut être question de miracle quand la vie d’un jeune sportif mêle aussi intimement le travail et la passion.
En août 2003, Jérémy Roy vient de fêter ses 20 ans quand il passe professionnel dans l’équipe de La Française des Jeux ; il est doué, a failli être champion d’Europe espoirs, second derrière l’Italien Visconti ; mais il ne peut être question pour lui de renoncer à ses études en misant tout sur le cyclisme ; il obtient une Bourse de la Française des Jeux et est à la fois étudiant et coureur cycliste, à l’Ecole le matin, sur les routes le soir, afin de garder la forme et s’aguerrir dans les courses, lors des vacances scolaires notamment ; en 2007 il est major de sa promotion à l’Institut National des Sciences Appliquées de Rennes et décroche le diplôme d’Ingénieur en Génie Mécanique et Automatique. Ce brillant succès universitaire ne l’empêche pas de participer quelques semaines plus tard à la Vuelta où il termine 3ème d’une étape.
Jérémy Roy a été désigné comme le coureur le plus combatif du Tour 2011. Cette distinction est à la fois une récompense et une promesse : récompense, car elle vient en retour du travail constant et intense effectué tout au long de ces dernières années ; promesse, car elle met en valeur l’athlète et l’homme, selon la maxime « mens sana in corpore sano ».
Et surtout elle a valeur d’exemplarité, en ce qu’elle démontre que l’on peut pratiquer son sport au plus haut niveau avec succès, sans pour autant négliger la nécessaire acquisition de connaissances à L’Ecole, l’Université ou dans les Centres de Formation, qui permettront au champion de réussir sa vie d’Homme, une fois terminée la carrière sportive souvent de brève durée.
Nous avons admiré Jérémy Roy : ses chevauchées sont d’ores et déjà entrées dans la légende du cycle et nourriront demain l’imagerie populaire ; nous saluons aussi le discernement de l’Homme ayant compris que le moment du sport ne dure qu’un temps et qu’il convient de se préparer à la vie de demain, celle qui vient après que se sont tues les clameurs des bords de routes.
Pour cela, pour cette exemplarité, qu’il en soit remercié !
Jean Collin, Secrétaire